On ne se rend pas assez compte de ce que peut la main de la femme, de ce qu’elle fait et, hélas ! de ce qu’elle défait. Aucune fortune ne résiste à la négligence ou au luxe ; nulle misère ne dure devant le travail et l’économie. Mais qu’est-ce que le travail ? Qu’est-ce que l’économie ? Il y a des maitresses de maison qui négligent leur ménage pour refaire le réseau d’une dentelle ; d’autres assistent les malades et ne savent pas prévoir la maladie. Le travail, c’est la production utile ; l’économie, c’est la conservation. L’économie doit être la caissière de la maison, la gardienne de la bourse et une maitresse absolue à laquelle tout le monde obéit. Ce n’est pas seulement dans l’emploi sage et sévère de l’argent que l’économie doit s’exercer ; elle trouve encore son application ordinaire dans les habitudes d’ordre et de travail, dans les soins qu’une femme prend de tout ce qui appartient au ménage : meubles ou articles de toilette. Il ne faut pas oublier que l’ordre est la base de l’économie ; tout ce qui est propre et bien entretenu dure plus longtemps, et par conséquent a moins souvent besoin d’être remplacé, que ce qui est mal soigné. L’économie comprend encore, on ne saurait trop le répéter aux jeune filles, la manière de bien faire la cuisine. Elle consiste à ne faire que le bon nombre de repas reconnus suffisants pour la santé, et à choisir pour nourriture des aliments qui, tout en étant moins chers, sont plus fortifiants que d’autres. La femme économe est une vraie providence pour sa maison : non seulement elle veille aux dépenses et entretient avec soin les vêtements et le mobilier, mais elle sait encore trouver mille ressources pour augmenter le budget et par suite, le bien-être de la famille. Elle conserve, par exemple, tout ce qui, n’étant plus propre au service, peut-être revendu, même pour une somme minime. L’épargne peut encore être considérable sur les provisions de ménage : aliments, linge, combustible, éclairage, etc. Il est nécessaire pour cela que la femme connaisse, par une expérience journalière, la valeur et le prix de choses. Elle ne doit pas craindre de prolonger sa course, s’il le faut, pour acheter à un sou meilleur marché. Ces sous répétés, s’ils sont journellement mis de côté, finiront par produire une somme importante et faire dans vingt ans la position d’un des enfants. Une maitresse de maison doit être économe de son temps comme de son argent. Gaspiller le temps, c’est laisser sur la route de l’argent qu’on ne se donne pas la peine de ramasser ; dépenser de l’argent mal à propos, c’est faire acte de folie. Que de femme pourtant achètent à la légère et sans calculer des objets inutiles ! Elles sont bien coupables à cause des conséquences que leur imprévoyance peut avoir pour l’avenir de leurs familles. Persuadez-vous bien que les habitudes d’économies valent mieux qu’une dote considérable. Une femme économe est un trésor : c’est elle qui fonde l’aisance, le contentement et l’union du foyer. C’est une fée à laquelle on pourrait appliquer le vers de Boileau : « Tout ce qu’elle touche se transforme en or. » Une ménagère économe fait elle-même toutes sortes de travaux : elle est un peu couturière pour ses robes et le vêtements de ses enfants, un peu modiste pour les bonnets et chapeaux, tailleuse pour les habits de son mari ou de son fils, repasseuse et lingère pour l’entretien du linge. A la campagne, elle tire parti de son potager, de son verger, de son étable et de sa basse-cour, et contribue ainsi largement à la prospérité et au bien-être de sa maison. Soyez donc, vous aussi, laborieuses, réfléchies, économes dans l’achat et emploi de toute chose. Apprenez de bonne heure à calculer et à connaitre la valeur de l’argent ; n’oubliez pas que l’aisance est toujours le fruit de l’économie, mais d’une économie bien entendue et pratiquée tous les jours.